
En 2009, la France a détruit un nombre incroyable d’emplois salariés en 2009. La nouvelle a été largement commentée et analysée. Mais le rapport des services d’Eric Woerth, publié le 5 août dernier, livrait d’autres informations, des constats plus troublants pour le discours dominant: traitement social du chômage en trompe l’oeil, pré-retraités poussés chez Pôle Emploi, sous-emploi faramineux, la liste est longue, et noire.
1. Jeudi dernier, la direction des études économiques du ministère du travail publiait un bilan de l’emploi en 2009: 255 000 emplois ont été détruits en 2009, après 145 000 l’année précédente. On s’abritera derrière la crise pour l’explication majeure de cette dégradation sans précédent. Mais la DARES fournit surtout une photographie très complète du nombre de Français en recherche d’emploi : à fin 2009, on comptait 4,379 millions d’inscrits à Pôle Emploi, dont 1,3 millions de longue durée, et 529 000 dispensés de recherche d’emploi (stage, formation, maladie).
Sur ces 4,4 millions, seuls 2,236 millions étaient indemnisés par Pôle Emploi, un nombre inférieur de 400 000 aux demandeurs d’emploi sans aucune activité (2,645 millions).
2. La mesure du chômage technique est rarement connue, donc rarement communiquée. La DARES répare cette lacune. Fin 2009, le sous-emploi concerne 1, 439 millions de personnes, dont 1,026 millions de femmes. Cette mesure regroupe les temps partiels contraints et le chômage technique partiel en entreprise. Et le sous-emploi ne s’est pas résorbé : il était de 5,1% de la population active fin 2008; il a culminé à 5,7% au second trimestre 2009. Il était toujours à 5,6% fin 2009.
3. La DARES livre aussi une estimation du «halo» du chômage, c’est-à-dire ces chômeurs cachés : en 2009, «près de 850000 personnes souhaitaient travailler mais n’avaient pas été comptabilisées comme chômeuses, soit 2,1 % de la population en âge de travailler.»
Sommons ces différentes catégories : 4,4 millions de demandeurs inscrits à Pôle Emploi + 850 000 chômeurs cachés + 1,1 millions de sous-employés (*), soit un total de 6,3 millions de personnes en manque d’emplois à la fin de l’année dernière. Nous sommes bien loin des commentaires gouvernementaux sur la seule catégorie A officielle de Pôle Emploi…
4. On l’a dit et répété sur ce blog, la récession économique a débuté en France avant le krach boursier de l’automne 2008. La faillite des subprimes américains a eu des répercutions faramineuses sur l’économie mondiale. Mais en France, les banques – on nous l’a souvent répété – ont bien résisté, moins exposées qu’elles étaient à ces risques spéculatifs. Et en France, l’emploi s’est dégradé plutôt qu’ailleurs, quelques mois, pour être précis, après l’entrée en vigueur, le 1er octobre 2007, de la fameuse défiscalisation des heures supplémentaires. La mesure phare de Nicolas Sarkozy a précipité la dégradation du marché du travail. La DARES rappelle en effet que «la contraction de l’emploi total» a été «entamée au deuxième trimestre 2008». En particulier, elle précise que l’emploi intérimaire s’est effondré dès le 1er trimestre 2008. L’intérim a été le premier affecté par l’effet d’aubaine de la mesure sarkozyenne. La DARES parle de «pertes historiques», et ce, jusqu’au premier trimestre 2009. (more…)